A 48 ans, mariée et mère d’un fils de 23 ans, Madhvi Jhamna fait partie de notre réseau de petits planteurs. Cette mère courageuse habite Moka et plante depuis 10 ans des laitues, des bâtons verts, tom pouce et des fines herbes principalement sur un terrain d’une superficie de 1 arpent. Occasionnellement, il lui arrive de produire des choux fleurs et du chou.
Mme Jhamna avait pas mal de prédispositions à faire de l’agriculture son métier. Son père était planteur et déjà toute petite, elle aidait durant la récolte. Sa belle-famille l’était aussi. Elle étudie le secrétariat, est surveillante d’examens nationaux au Mauritius Examination Syndicate (MES) mais rapidement après son mariage la terre la rappelle et elle se dit que ce serait un bon complément de revenue qui l’occuperait. Elle s’ennuyait à la maison.
Son époux, a un métier de chauffeur mais il l’aide à préparer la terre après son travail en soirée ou en week-end. Mme Jhamna emploie une employée à temps partiel mais c’est elle qui y consacre le plus de temps. Elle ne lésine pas à la tâche. « Ça me fait faire de l’exercice et perdre du poids », dit-elle en rigolant.
Sa vie a changé, il y a 5 ans, suite à une grave épreuve de santé subit par son fils, qu’elle a dû affronter avec son époux, épaulant leur fils durant sa maladie. Ça a été le détonateur qui lui a fait prendre conscience de l’importance de la santé et de la nourriture que nous ingérons. « Nou ine cone valeur la santé », dit-elle.
Elle invite les consommateurs à consommer de manière raisonnée et à découvrir le vrai gout d’un légume sans pesticide. « So gout extra » et il se conserve très bien également.
Ce qu’elle préfère dans son métier, c’est quand toute la famille incluant son fils se retrouve dans le jardin. “C’est un réel plaisir, un travail d’équipe”. Mme Jhamna ne ressent pas la fatigue quand elle est dans le jardin, c’est autant son travail que son loisir. Elle se sent équilibrer et à l’aise quand elle est dans le jardin. Elle l’est moins si elle prend une journée de congé pour aller se promener. Être sur son terrain la défoule, lui vide la tête, la déstresse. Elle prend plaisir à voir pousser les plantes, qu’elles rapportent de beaux légumes sains. Cela l’apaise.
En termes de difficultés liées à son métier, elle note clairement le changement climatique et les extrêmes de températures en été. Elle décrie un peu le manque d’intérêt des jeunes à travailler dans l’agriculture : « Ils préfèrent certainement avoir une main manucurée plutôt que d’avoir une main de travailleuse comme moi – c’est un choix que j‘assume ».
A travers la production de légumes sains issus de l’agriculture raisonnée, Mme Jhamna veut contribuer à ce que les gens comprennent qu’ils ont le choix de mieux manger, qu’ils comprennent la valeur de la santé, redit-elle. Elle souhaite que ses légumes puissent obtenir un signe distinctif pour les différencier car lorsqu’ils atteignent le marché, ils se mélangent aux autres légumes peut-être moins sains.
Elle vend à des marchands habituels qui viennent chercher ses légumes en semaine et le samedi. C’est son fils qui va déposer les légumes avant d’aller à l’université en cours. Tout le monde contribue. Cela lui fait un revenu de plus pour compléter celui de son mari mais surtout et aussi des légumes sains dont la famille sont les premiers à consommer.
Mme Jhamna est fière de s’être jointe au groupe Smart Agriculture. Elle apprend beaucoup des formations et essaie de mettre en pratique les techniques et astuces sur sa parcelle. Elle utilise beaucoup moins de pesticides : « il faut que les planteurs comprennent qu’une plante n’a pas besoin de pesticide systématiquement, c’est de l’eau dont elle a besoin ». Elle observe et ne traite que si nécessaire.
Son but est un jour d’avoir une serre pour pouvoir lisser l’effet des intempéries sur ses légumes. Cela lui permettrait d’être plus productive.
Mme Jhamna est très positive sur l’avenir. Elle a foi que les choses vont changer dans le bon sens. Elle-même répand la « bonne parole » sur le mieux vivre et le mieux manger à qui veut bien l’entendre. Elle pense que c’est sa mission, son devoir de diffuser ce genre de message vu qu’elle en est consciente. « Le plus important », dit-elle, « c’est ce qu’on a à l’intérieur et ce qu’on met à l’intérieur de notre corps, les gens ont tendance à s’arrêter à l’apparence – un facial, une manucure, de beaux habits, de l’argent… la santé passe avant tout, bizin conne manze ».